Allaitement maternel : des clés pour une décision éclairée
Allaiter ou non ? Voici l’une des principales préoccupations des futurs et des jeunes parents. Estelle, Infirmière Puéricultrice et Consultante en lactation, vous partage ses conseils afin de vous accompagner au mieux dans cette réflexion.
FAIRE LE CHOIX DE L’ALLAITEMENT
Le temps de la réflexion
Il est intéressant de penser à la question de l’allaitement dès la grossesse. S’informer permet d’anticiper, de décider avant de se trouver face à son bébé qui vient de naître… Pour autant, ce choix n’est jamais définitif, vous êtes libre de revenir sur votre décision, quelle qu’elle soit, à tout moment.
Si vous êtes en couple, n’hésitez pas à aborder le sujet afin d’élaborer ensemble votre projet, pour votre bébé et vous. Commencez par évoquer chacun les points qui vous attirent dans l’allaitement, pour ensuite discuter de vos craintes. Vous pourrez ainsi cheminer tout au long de la grossesse, et de l’allaitement. Quel que soit l’âge de votre enfant, la communication autour de vos envies et bonheurs, limites ou difficultés est essentielle.
Les bénéfices de l’allaitement maternel
La composition vivante et évolutive du lait humain est parfaitement adaptée à la croissance et au développement cognitif, intestinal et immunitaire du bébé. De nombreuses études scientifiques ont prouvé que l’allaitement diminue les risques d’infections (ORL, digestives) et leur sévérité, mais aussi les risques de surpoids, d’obésité ou de diabète de type 2. Les tétées au sein participent à un bon développement maxillo-facial et le lait maternel favorise celui du goût.
Les intérêts de l’allaitement ne se limitent pas à l’enfant ! Ils sont aussi importants pour la santé maternelle : moindre risque d’hémorragie du postpartum, ainsi que, à long terme, de cancer du sein ou de l’ovaire, de diabète ou encore d’infarctus. L’accordage hormonal entre une mère allaitante et son bébé facilite la création du lien d’attachement ainsi que la récupération maternelle. Plus l’allaitement dure, plus les bénéfices santé pour la mère et l’enfant sont grands. Cela est appelé « l’effet dose ».
L’allaitement au sein regroupe également des avantages pratiques (pas de préparation ou de nettoyage, rien à prévoir en cas de sortie avec bébé…) et économiques pour le foyer (l’alimentation aux préparations pour nourrisson coûte en moyenne 500 € pour les 6 premiers mois du bébé).
L’allaitement maternel réduit de façon importante l’impact écologique familial : pas de pollution induite par l’élevage laitier, limitation de la production des matières premières ajoutées, réduction de la fabrication industrielle de la poudre et des emballages, moins de transports, de stockage, de déchets…
Les réticences
La culture du biberon est très présente dans notre pays et il peut être difficile de s’en affranchir. Par ailleurs, l’érotisation médiatique du corps féminin participe à l’oubli de la fonction première des seins, qui est de produire du lait. L’allaitement dans les lieux publics peut également représenter un obstacle pour certains parents : sachez qu’il existe de nombreuses astuces pour allaiter discrètement (en commençant par une tenue vestimentaire adaptée).
Si vous le souhaitez, sachez que vous pouvez également conserver votre lait maternel, Babymoov vous explique tout dans son article « La conservation du lait maternel ».
Le rôle du parent non allaitant auprès de son bébé
L’attachement est un besoin primaire et vital. La construction de ce lien entre un parent et son bébé dépend de leur proximité et de l’ensemble de leurs interactions. Les temps d’alimentation ne sont qu’une partie de celles-ci. Chaque parent, allaitant ou non, peut partager avec son enfant de nombreux moments d’échanges :
- des séances de peau à peau avec bébé pendant lesquelles parent et enfant sécrètent de l’ocytocine, hormone de l’amour et du bien-être (et de l’éjection du lait) ;
- des moments de portage (à bras ou en écharpe), des bercements, des massages, qui comblent les besoins de proximité et de mouvement du bébé ;
- des temps de change et de bain, instants privilégiés mêlant contact physique, confort et communication ;
- de l’accompagnement au sommeil lorsque le bébé ne s’assoupit pas au sein ;
- des chansons, des histoires, des jeux d’éveil, qui lui permettent d’explorer, d’entrer en relation.
Le co-parent a donc toute sa place auprès de son nouveau-né allaité… et de sa maman.
L’ALLAITEMENT D’UN NOUVEAU-NÉ
Les rythmes du nouveau-né
Votre nouveau-né a besoin d’être porté le plus possible et de téter souvent. En effet, il naît immature sur de nombreux plans, et le contact de son parent est aussi vital pour lui que le lait. Le portage (peau à peau ou non) l’accompagne dans l’assimilation de toutes les sensations que la vie extra utérine lui procure, en toute sécurité affective. Il participe à l’intégration progressive de son schéma corporel, séparé du corps de sa maman. Lorsque votre bébé s’apaise dans vos bras, il vous montre à quel point il a besoin de vous.
La régulation de la température et la gestion de la pesanteur usent de l’énergie : plus votre bébé sera porté, moins il dépensera d’énergie… donc plus il prendra du poids et s’éveillera. Pensez également à limiter les bains à deux par semaine, au cours du premier mois (puis un jour sur deux ensuite).
L’estomac d’un nouveau-né est gros comme une cerise. Il grossit peu à peu pour atteindre la taille d’un œuf autour d’un mois de vie. Quel que soit son mode alimentaire, il a donc besoin de manger par petites quantités, fréquemment.
La mise en route de l’allaitement
Lors de la naissance, la chute hormonale provoquée par l’expulsion du placenta active la sécrétion de lait. Ensuite, plus les seins sont vidés fréquemment et efficacement, plus la production de lait augmente. Il est donc contreproductif de faire patienter un bébé en espérant qu’il mange davantage par la suite, ou de lui imposer des horaires de tétées. Le risque est d’une part l’engorgement, d’autre part que votre bébé ne prenne pas assez de lait.
Faites-lui confiance et laissez-vous guider par ses signes : il/elle tourne la tête, s’étire, sort la langue, ouvre la bouche ou y porte ses mains… même si ses yeux sont encore fermés, c’est le moment de lui proposer le sein. Si votre bébé est trop agité ou se met à pleurer, le calmer avant la tétée la rendra plus efficace.
Les premières semaines, les tétées sont donc irrégulières, tant en fréquence qu’en durée et en volume, en fonction de l’éveil et des besoins de votre bébé (faim, soif, chaleur, réconfort, sommeil…). En moyenne, les bébés allaités tètent entre 8 et 12 fois par 24h, parfois un peu moins, parfois bien plus. Ils s’adaptent à leurs capacités de succion, au débit et au volume de lait disponible à chaque tétée, à la taille de leur estomac, à leurs dépenses énergétiques…
Il existe une multitude de positions pour allaiter, la ou les meilleures étant celles qui sont les plus confortables pour vous deux. Quelques petites astuces peuvent faciliter votre installation : un marchepied et des coussins sous les bras soulageront votre dos et vos épaules lors de tétées en position assise, tandis qu’un coussin entre les cuisses vous apportera un soutien appréciable en cas d’allaitement allongé sur le côté. Quelle que soit la position, votre bébé sera plus stable au sein avec son corps bien plaqué contre le vôtre en « ventre à ventre », la tête dans l’axe, ses mains proches de son visage (ou sur le sein), ses pieds l’un contre l’autre et en appui sur un support (votre bras, vos jambes, votre ventre, ou un coussin).
L’organisation à la maison et en dehors
Donner naissance et prendre soin d’un nouveau-né demandent de l’énergie. Le soutien quotidien facilitera votre récupération et votre bien-être, et donc votre allaitement. La participation de personnes de confiance à la gestion quotidienne du foyer et des éventuels aînés sera très bénéfique, surtout au cours des premières semaines post-partum : c’est ce qu’on appelle le « mois d’or ».
En tant que co-parent, vous pouvez prendre part à l’allaitement de votre bébé en prenant soin de sa maman (câlins, massages…), en favorisant son sommeil (aller chercher votre bébé dans son berceau la nuit, s’occuper de lui le temps d’une sieste ou d’une grasse matinée…), ou encore en lui préparant de bons repas : nourrir la mère qui nourrit l’enfant, un travail d’équipe !
Profitez du récent allongement du congé paternité et d’accueil de l’enfant pour prendre tous ensemble le temps de faire connaissance avec votre bébé, laissant de côté toutes les tâches quotidiennes qui peuvent attendre.
Allaiter au sein, c’est avoir toujours sur soi du lait prêt à consommer pour son bébé : vous êtes prête à partir en balade en un rien de temps. Pour autant, allaiter partout n’est pas une évidence pour tout le monde. Si vous en ressentez le besoin, pensez à agrémenter votre garde-robe de vêtements spécialement conçus pour allaiter en toute discrétion. Un débardeur et un chemisier font aussi très bien l’affaire ! Vous pouvez également allaiter en portage.
Le soutien adapté
Les débuts de l’allaitement sont un temps de découverte et d’ajustement entre votre bébé et vous.
Vous pouvez également consulter notre article « Allaiter ou pas ? L’avis d’une sage-femme ! » sur notre blog parental.
En cas de doutes ou de difficultés, vous pouvez vous tourner vers des professionnels de santé spécifiquement formés, comme les infirmières puéricultrices et les consultantes en lactation (certifiées IBCLC ou titulaires d’un diplôme universitaire en lactation humaine et allaitement maternel) : elles vous accompagneront dans l’observation de votre bébé et l’ajustement nécessaire à un allaitement qui vous correspond, selon votre projet et vos besoins.
Pour échanger avec d’autres parents, il existe des associations locales de soutien à l’allaitement et à la parentalité, des « cafés parents » et des lieux d’accueil parents-enfants (LAEP). S’entourer de personnes ayant une expérience positive participe à la réussite de votre projet d’allaitement.
Estelle, Infirmière puéricultrice et Consultante en lactation DIULHAM – Doudoucare